Source : http://pagesperso-orange.fr/jdtr/rich1984.htm

Pierre Richet (1904-1983)
 

Né le 1/11/1904 à Paris, Pierre Richet commence ses études de médecine à Limoges.
1925 - Il entre à l'Ecole de santé navale de Bordeaux.
1930 - Rromus médecin lieutenant à l'Ecole d'application du service de santé des troupes coloniales, au Pharo. Il se voit confier la chefferie du poste médical de N'Guigmi.
1930 - Il débarque à Cotonou, rejoint Lagos par bâteau puis Kano par chemin de fer avant d'arriver à Zinder en camion. Il y arrive en pleine épidémie de fièvre jaune, au moment où le médecin lieutenant Duris venait d'en mourir.
1932 - Finalement il parvient aux bords du lac Tchad, dans son poste de N'Guigmi où un jour il voit débarquer, avec une équipe de camerounais, au terme d'une prospection de délimitation des glossines le long des rives de la Komadougou Yobé, le médecin colonel Jamot.
1934 - Il est promus capitaine et rentre en France.

1936 - Il part pour la chefferie médicale du cercle de Tenkodogo, en Haute-Volta. Il soigne les malades, sommeilleux et lépreux. Il y découvre l'important foyer d'onchocercose de la Volta Après deux ans de séjour il rentre en France et après son congé il est affecté au troisième Régiment d'infanterie coloniale.
1938 - Le service de lutte contre la maladie du sommeil que le médecin colonel Jamot avait projeté, mais jamais obtenu, en Afrique occidentale, est proposé une fois de plus avec de nouveaux arguments.
1939 - l'arrêté numéro 342 portant création d'un Service autonome de la maladie du sommeil est signé par le Gouverneur général P. Boisson. Richet, remarqué par ses chefs pour l'intérêt qu'il porte aux endémies, est recruté comme adjoint par le médecin colonel Gaston Muraz, chef du Service général autonome de la maladie du sommeil nouvellement créé, à Bobo Dioulasso, centre historique du dispositif.
Commencent alors trois années passionnantes de collaboration, sans jours fériés et sans dimanches, mais riches en revanche d'heures supplémentaires diurnes et nocturnes et, il faut le savoir aussi, d'assez belles parties de chasse avec cinquante buffles à son tableau, entre l'adjoint et le chef de service. Il y a trois cents mille sommeilleux à traiter d'urgence. Tout est à organiser, les secteurs spéciaux et les secteurs annexes à mettre en place, il faut refaire les estimations de Jamot déjà trop anciennes, parcourir les pistes, rassembler les villages, palper les épaules, débusquer les trypanosomes, définir les méthodes, confier le travail aux chefs de secteur et surveiller l'application des consignes et les résultats obtenus. En plus de cela, dès le mois de septembre, c'est la guerre. Le service général autonome de la maladie du sommeil avait fait des jaloux. Le moment paraît venu, déjà, de le lui faire payer. le général M., à Dakar, ne se prive pas d'y puiser largement, au nom des nécessités de la guerre, les médecins auxiliaires ou les chefs de secteur pour les affecter dans des postes où il n'en existait même pas auparavant. Les chefs de secteur, les uns après les autres, partent et risquent de laisser un service exsangue et désorganisé. Certains passent la frontière, du côté de Batié, pour rejoindre les français libres par la Gold-coast. Le colonel Muraz demande qu'on lui laisse un minimum de cadres, mais aucun de ses arguments n'est retenu. Chacun doit se dédoubler. En plus de ses fonctions d'adjoint et de chef du secteur sept de Bobodioulasso, Richet assume la chefferie du secteur huit. Il ne prend jamais de repos, suivant l'exemple de l'infatigable Muraz.
Celui-ci d'ailleurs, en 1941, commence à avoir de lourds ennuis, mais ce n'est pas son histoire que l'on raconte ici. L'Inspecteur des colonies de R. s'installe à Bobodioulasso et commence une inspection dont je ne dirai rien, sinon qu'elle a duré un mois et demi, avec un acharnement qui a moralement détruit Muraz et durablement impressionné le jeune Richet. On devine Muraz plus soucieux d'efficacité que de rigueur administrative. De plus, l'adjoint administratif qui lui avait été imposé, M., était paresseux, incapable, procédurier. L'inspection de de R. lui permet de prendre une revanche sur ses chefs, il ne s'en prive pas. En décembre, Gaston Muraz est renvoyé en France, comme cet apôtre de Jamot dit Casteigt, le chef du secteur de Batié, à Richet, momentanément dégoûté de tous. Dès l'arrivée du médecin colonel Le Rouzic, en remplacement de Muraz, il demande à celui-ci de le relever de ses fonctions d'adjoint à la chefferie et de lui confier le secteur spécial de Diébougou, au nord du pays Lobi. Le médecin capitaine Richet, après ses séjours à N'Guigmi et à Tenkodogo se sentait fait pour la brousse et aspirait à y retourner, après ses trois années écrasantes d'activité en ville. Non qu'il y ait séjourné beaucoup, d'ailleurs, en ville, il était toujours en tournée. Jamot a sa statue devant le ministère de la santé à Yaoundé. L'ancienne chefferie de Bobodioulasso s'appelle aujourd'hui le centre Muraz. Mais pour Richet qui, sans doute, le pressent déjà, les plaies sont encore trop récentes. Il se retire à Diébougou, sous la grande et fraîche paillote du chef de secteur, face au jardin d'euphorbes et de pervenches de Madagascar, au dessus de la falaise qui offre au regard, le soir, vers le sud, après le départ des infirmiers, son immense paysage rouge, ocre, jaune et gris enfin dans le lointain où terre et ciel se confondent sans horizon, jusqu'à la nuit qui efface toute couleur en moins d'un quart d'heure, apporte fraîcheur et repos, et ses mille petits cris et bruits qui donnent au silence une épaisseur sensible et apaisante. Il n'avait plus connu cela depuis trois ans.
Il reste trois mois à Diébougou.
1942 - Il est rapatrié puis rejoint le Maroc en tant que médecin chef du 6ème régiment de tirailleurs sénégalais.
1943 - Il est détaché au Corps franc d'Afrique et devient médecin chef du service de santé de la deuxième division blindée, en Tunisie puis revient au Maroc, il suit la deuxième division blindée en Algérie en avril 1944.
1944 - Il embarque à Mers-el-kébir pour l'Angleterre jusqu'en juillet et participe au débarquement, à Grandcamp, le premier août 1944.
1945 - Il est directeur du service de santé de la 2ème division blindée.
1946 - Il est nommé médecin chef de la place de Saigon et chef d'Etat-major du Directeur du Service de santé des troupes françaises en extrême orient. En novembre de la même année il est Directeur du Service de santé des troupes françaises d'Indochine du sud.
1949 - Il commence un stage à l'Institut Pasteur pour suivre le grand cours et récolter l'étiquette de pastorien.
1950 - Il retourne en Indochine comme Directeur du service de santé des Forces terrestres du nord Viêt-nam et de la zone opérationnelle du Tonkin, pour 3 ans.
1952 - Il rentre en France.
1953 - en position hors cadre, il est d'abord directeur par intérim du service de santé de l'Afrique Equatoriale et du Cameroun, puis, dès le mois d'octobre, Directeur du Service Général d'Hygiène Mobile et de Prophylaxie de l'Afrique équatoriale, prenant la suite du médecin général André Lotte qui lui laisse un service de la trypano parfaitement rodé.
1954 - Il s'adresse au Fonds d'Investissement pour le Développement Economique et Social et au Fonds International de Secours à l'Enfance et reçoit les fonds pour engager la vaste campagne contre la lèpre qu'il avait rêvée. Il aura aussi le moyen de dégager quelques crédits pour instaurer une lutte contre l'onchocercose.
1955 - Il est promu médecin général.
1956 - Il traite les onchocerquiens par ablation des kystes et envisage de répandre le gammexane par hélicoptère dans le Mayo-Kebbi. C'est, en réalité, dix ans trop tôt.
Son bilan contre la lèpre : 7.800 malades traités au Moyen Congo, 5.200 au Gabon, 32.200 en Oubangui-Chari, 21.000 au Tchad. Il instaure les circuits de traitement à la disulone jusque dans les villages, chaque semaine quand c'est possible, au moins deux fois par mois partout ailleurs. 50.000 malades sont inscrits sur les cahiers des circuits, 20.000 sur ceux des formations fixes. Il lui faut par an plus d'un million de flacons de disulone en suspension dans l'huile de chaulmoogra et plus de sept millions de comprimés de sulfone, sans compter vingt voitures et une centaine de bicyclettes. C'est un début. Il définit son objectif qui est d'obtenir un amenuisement maximum et rapide du réservoir de virus. Deux ans plus tard, 126.185 lépreux sont traités.
1955 - Richet devient Directeur du service général d'hygiène mobile et de prophylaxie de l'Afrique occidentale à Bobo Dioulasso.
1958 - avec les promesses d'indépendance du discours de Brazzaville c'est tout le Service des grandes endémies qui est, à court terme, menacé de disparition. Richet entreprend une croisade dans les capitales, muni d'un rapport d'activité de cent pages. Il obtient la création de l'Organisation de Coopération et de Coordination pour la lutte contre les Grandes Endémies, l'OCCGE. Huit Etats africains et la France fixent le siège de l'Organisation à Bobo Dioulasso.
1959 - Il est Inspecteur technique de pathologie tropicale, à Paris.
1960 - Retour à Bobo Dioulasso en tant secrétaire général de l'Organisation. Il instaure les conférences techniques réunissant chaque année les spécialistes des endémies.
1968 - Avec la section Onchocercose de Bobo-Dioulasso et les entomologistes de l'ORSTOM, à la conférence de Tunis il met sur pieds le gigantesque Programme d'endiguement simulidien prévu pour vingt ans, 1974-1994, dans le bassin des Voltas.
27 janvier I983 - décès à l'hôpital d'instruction des armées Bégin, à Paris.